L'évolution des mots dans la société cubaine à partir des années 80
Le gouvernement qui permettait aux personnes âgées de cinquante-cinq ans et plus, de visiter ses parents aux Etats-Unis ont également autorise toutes les personnes âgées de plus de 18 années à voyager à l'étranger avec une « lettre d’invitation » au préalable. Deux sigles s'imposeront dans lexique administratif, « PVE[1] » et « PRE[2] », qui caractériseront une période où des citoyens simples, des académiciens, des professionnels, des peintres, des écrivains et d'autres artistes s'installeront partout dans le monde et qui deviendront « los quedados[3] ».
La production du sucre, première industrie cubaine, laisse sa place au tourisme. Le « récolte sucrière » ne donne pas les bienfaits de l'industrie touristique bien que celle-ci « déforme » les employés, avides des pourboires et entraîne une renaissance de la prostitution féminine et masculine qui sera connue comme « jineterismo[4] ».
Afin de développer le tourisme, on oublie le « développement durable » et les « contingents[5] » construisent « pedraplenes » entre les îlots de la côte nord, souvent sans considérer la destruction de « l'écosystème marin » et la disparition d'espèces locales. Les « contingents » surgissent pour démontrer la poussée « de nouvelles formes de production » capables d'obtenir « des rendements élevés » et « une haute productivité ». Pour éviter la désertion du travail dans un secteur dur et problématique comme la construction, « l'attention à l'homme » devient un mot d'ordre dans les « contingents », ce qui fait une différence profonde face au reste des forces du travail du pays, dans une société qui se vante d’être égalitaire.
La population désespère devant les problèmes de l’usage de deux monnaies en cours. La « dualité monétaire » s’intègre au langage des économistes et de toute la société. L'usage de deux monnaies approfondit le chaos social et « l'inégalité social », un terme souvent lié aux « remesas[6] », qui sont les envois d'argent en provenance de l'étranger.
On parle de « genre » et de « discrimination » dans le nouveau millénaire. Des figures s'imposent de l'intérieur même du régime essayant, par le biais du mot, de développer une nouvelle mentalité, comme celle de la tolérance envers les homosexuels ; un débat intellectuel, comme celui commencé par les écrivains ou sociétal, mené par les étudiants des universités. Les générations changent et génèrent de nouveaux mots dans le développement social. La vieille garde, ne contente de partager le pouvoir revient à la charge développant sa diatribe idéologique avec l'étendue de phrases ancrées dans l'histoire de la révolution : « Le socialisme ou la Mort », lequel s'unira au terme discursif de « la Patrie ou la Mort, Nous vaincrons ».
La « période spéciale » qui a été une recherche passionnée et permanente de solutions pour subsister et pour « avancer », a trouvé une phrase substitutive dans les temps qui courent : la « bataille d'idées ». Avec cette « bataille » les autorités cubaines ont pour objectif trouver la solution à tout ceux qui pendant des années n'a pas pu être résolu : le déficit de logements, le manque de produits alimentaires, l'insertion au travail, l’adéquate rémunération salariale et même une revalorisation possible du « peso cubain ». Pendant ce temps, la population suit obstinée à chercher ses propres solutions qui vont souvent à la rencontre de la « légalité socialiste », et celui qui n'a pas pu obtenir ou a perdu le permis que l’autorise à travailler comme « cuentapropista[7] » continuera à « lutter » jusqu'à ce qu'un voisin le dénonce ou les autorités le découvrent. Les restaurateurs continueront d'offrir une nourriture cubaine dans les « paladares », ces restaurants privés pour les touristes avides des nouvelles sensations ; les « boteros » se chargeront d'acheter le combustible nécessaire pour aller d'une ville à l'autre de l'île, et dans tous les « pueblos » et les villes, faute des transports publics, la population se déplacera dans les « charrettes » trainées par chevaux et dans les « bicitaxis » conduits par « bicitaxistas » épuisés qui donneront un coup de l'immobilisme au paysage urbain.
Le “printemps noir” de 2003 est presque ignoré dans l'île, dont la population connaît seulement l'information officielle du régime à travers de leurs médias.
L’Internet est inaccessible. Néanmoins, elle est accessible dans les cybercafés où il faut payer en « pesos convertibles ». L’accès aux machines et est un service destiné aux touristes étrangers. Intranet est un réseau interne qui permet la connexion à l’intérieur de l'île. L’Internet fonctionne, dans les entreprises, dans les universités, qui ont un temps de connexion assez rigide ; et évidemment, internet est accessible aux cadres de la nomenclature. Tous les moyens de communication officielle à Cuba sont liés au réseau d’Internet. Mais non pour toute la population. En fait, avoir des équipes d'informatique n'est pas à la portée de tout le monde. Les intellectuels communiquent entre eux et récemment il y eu une polémique intéressante sur la toile à propos du « quinquennat gris[8] », une étape noire pour les créateurs de culture qui ont été étouffés et obligés à subir l’auto censure. Les nouvelles générations ainsi que d’autres groupes générationnels, ont appris le terme dans une époque d'évolution politique et sociale. Une époque dans laquelle, Cuba est marquée par les mots qui indiquent un développement, comme « presse numérisée », « blog » et « blogueurs ». Une époque dont « l'opposition » au régime est organisée et apparaissent des espaces de « dissidence ». Des syndicats, des journalistes et des bibliothèques s'annoncent « indépendantes ». Des mots comme « changement », « transition » et « prisonniers politiques » acquièrent une certaine force.
Ils acquièrent force également les phénomènes météorologiques et avec cela des mots réapparaissent avec une autre poussée qui ne va pas précisément avec le développement : « misère », « abandon », « désespoir », et pour survivre à ces difficultés, il faudra continuer d'utiliser celles qui se sont maintenues pendant des décennies pour affronter les carences : « voler », « dévier », « inventer », « lutter », « résoudre », dont la signification étymologique est bien connue dans toutes les sphères de la société. Une société qui ne réussit pas à s'imposer comme une « société civile », dans laquelle les autorités poussent à la « dénonciation » des « oiseaux de charogne », comme ils ont été récemment baptisés, ces citoyens qui en essayant de survivre dévient les « normes révolutionnaires » lesquelles n'admettent pas la « blandenguería[9] ».
Le mot du développement dans la société cubaine à su s’imposer dans le temps comme une lampe d’huile clignotante. À la recherche de nouveaux essors, pour justifier les échecs ou pour faire valoir la raison même quand il est presque impossible de convaincre. Le mot devient un refuge, une douleur, une médecine qui peut faire encore plus de dommage.
Le mot « transition » est étranger aux Cubains de l'île. En dehors de Cuba, les exilés, les émigrants économiques, les chercheurs et des académiciens l’utilisent comme un mot clef dans tous les scénarios préconçus.
Pourrait-il se réinventer, le mot exact qui pousse au développement d'un « dialogue » entre tous les Cubains et qui génère la possibilité d'un « changement » ? En attendant, les mots du développement ont la parole.
[1] Permis de visite à l’étranger.
[2] Permis de résidence à l’étranger.
[3] Ceux qui émigrent dans des conditions plus confortables : voyages de visite, d’études, de travail ou de missions diverses en tant que coopérants, athlètes en compétition ou fonctionnaires.
[4] Du mot « jinete ». Cavalier, cavalière, qui se promène à cheval. Le mot est utilisé en allusion aux jeunes qui se prostituent mais de façon péjorative.
[5] Brigades de construction destinées à travailler dans des chantiers relevant d’une haute importance économique pour le pays.
[6] Les « remesas » sont les envois de fonds qui correspondent à la part des revenus gagnés à l’étranger que les migrants rapatrient chez eux.
[7] Personne qui travail à son compte, avec une « licencia » ou « patente » demandé aux autorités au préalable.
[8] Période entre 1971 et 1976 pendant lequel, le président du Conseil national de la culture (CNC) fut le principal exécuteur d’une politique de censure et de marginalisation à l’égard de centaines des intellectuels et artistes cubains.
[9] Du mot « blandengue », une personne faible, docile ; ici « blandenguería » va dans le sens récriminatoire aux personnes incapables d’affronter les difficultés, les problèmes.
Le gouvernement qui permettait aux personnes âgées de cinquante-cinq ans et plus, de visiter ses parents aux Etats-Unis ont également autorise toutes les personnes âgées de plus de 18 années à voyager à l'étranger avec une « lettre d’invitation » au préalable. Deux sigles s'imposeront dans lexique administratif, « PVE[1] » et « PRE[2] », qui caractériseront une période où des citoyens simples, des académiciens, des professionnels, des peintres, des écrivains et d'autres artistes s'installeront partout dans le monde et qui deviendront « los quedados[3] ».
La production du sucre, première industrie cubaine, laisse sa place au tourisme. Le « récolte sucrière » ne donne pas les bienfaits de l'industrie touristique bien que celle-ci « déforme » les employés, avides des pourboires et entraîne une renaissance de la prostitution féminine et masculine qui sera connue comme « jineterismo[4] ».
Afin de développer le tourisme, on oublie le « développement durable » et les « contingents[5] » construisent « pedraplenes » entre les îlots de la côte nord, souvent sans considérer la destruction de « l'écosystème marin » et la disparition d'espèces locales. Les « contingents » surgissent pour démontrer la poussée « de nouvelles formes de production » capables d'obtenir « des rendements élevés » et « une haute productivité ». Pour éviter la désertion du travail dans un secteur dur et problématique comme la construction, « l'attention à l'homme » devient un mot d'ordre dans les « contingents », ce qui fait une différence profonde face au reste des forces du travail du pays, dans une société qui se vante d’être égalitaire.
La population désespère devant les problèmes de l’usage de deux monnaies en cours. La « dualité monétaire » s’intègre au langage des économistes et de toute la société. L'usage de deux monnaies approfondit le chaos social et « l'inégalité social », un terme souvent lié aux « remesas[6] », qui sont les envois d'argent en provenance de l'étranger.
On parle de « genre » et de « discrimination » dans le nouveau millénaire. Des figures s'imposent de l'intérieur même du régime essayant, par le biais du mot, de développer une nouvelle mentalité, comme celle de la tolérance envers les homosexuels ; un débat intellectuel, comme celui commencé par les écrivains ou sociétal, mené par les étudiants des universités. Les générations changent et génèrent de nouveaux mots dans le développement social. La vieille garde, ne contente de partager le pouvoir revient à la charge développant sa diatribe idéologique avec l'étendue de phrases ancrées dans l'histoire de la révolution : « Le socialisme ou la Mort », lequel s'unira au terme discursif de « la Patrie ou la Mort, Nous vaincrons ».
La « période spéciale » qui a été une recherche passionnée et permanente de solutions pour subsister et pour « avancer », a trouvé une phrase substitutive dans les temps qui courent : la « bataille d'idées ». Avec cette « bataille » les autorités cubaines ont pour objectif trouver la solution à tout ceux qui pendant des années n'a pas pu être résolu : le déficit de logements, le manque de produits alimentaires, l'insertion au travail, l’adéquate rémunération salariale et même une revalorisation possible du « peso cubain ». Pendant ce temps, la population suit obstinée à chercher ses propres solutions qui vont souvent à la rencontre de la « légalité socialiste », et celui qui n'a pas pu obtenir ou a perdu le permis que l’autorise à travailler comme « cuentapropista[7] » continuera à « lutter » jusqu'à ce qu'un voisin le dénonce ou les autorités le découvrent. Les restaurateurs continueront d'offrir une nourriture cubaine dans les « paladares », ces restaurants privés pour les touristes avides des nouvelles sensations ; les « boteros » se chargeront d'acheter le combustible nécessaire pour aller d'une ville à l'autre de l'île, et dans tous les « pueblos » et les villes, faute des transports publics, la population se déplacera dans les « charrettes » trainées par chevaux et dans les « bicitaxis » conduits par « bicitaxistas » épuisés qui donneront un coup de l'immobilisme au paysage urbain.
Le “printemps noir” de 2003 est presque ignoré dans l'île, dont la population connaît seulement l'information officielle du régime à travers de leurs médias.
L’Internet est inaccessible. Néanmoins, elle est accessible dans les cybercafés où il faut payer en « pesos convertibles ». L’accès aux machines et est un service destiné aux touristes étrangers. Intranet est un réseau interne qui permet la connexion à l’intérieur de l'île. L’Internet fonctionne, dans les entreprises, dans les universités, qui ont un temps de connexion assez rigide ; et évidemment, internet est accessible aux cadres de la nomenclature. Tous les moyens de communication officielle à Cuba sont liés au réseau d’Internet. Mais non pour toute la population. En fait, avoir des équipes d'informatique n'est pas à la portée de tout le monde. Les intellectuels communiquent entre eux et récemment il y eu une polémique intéressante sur la toile à propos du « quinquennat gris[8] », une étape noire pour les créateurs de culture qui ont été étouffés et obligés à subir l’auto censure. Les nouvelles générations ainsi que d’autres groupes générationnels, ont appris le terme dans une époque d'évolution politique et sociale. Une époque dans laquelle, Cuba est marquée par les mots qui indiquent un développement, comme « presse numérisée », « blog » et « blogueurs ». Une époque dont « l'opposition » au régime est organisée et apparaissent des espaces de « dissidence ». Des syndicats, des journalistes et des bibliothèques s'annoncent « indépendantes ». Des mots comme « changement », « transition » et « prisonniers politiques » acquièrent une certaine force.
Ils acquièrent force également les phénomènes météorologiques et avec cela des mots réapparaissent avec une autre poussée qui ne va pas précisément avec le développement : « misère », « abandon », « désespoir », et pour survivre à ces difficultés, il faudra continuer d'utiliser celles qui se sont maintenues pendant des décennies pour affronter les carences : « voler », « dévier », « inventer », « lutter », « résoudre », dont la signification étymologique est bien connue dans toutes les sphères de la société. Une société qui ne réussit pas à s'imposer comme une « société civile », dans laquelle les autorités poussent à la « dénonciation » des « oiseaux de charogne », comme ils ont été récemment baptisés, ces citoyens qui en essayant de survivre dévient les « normes révolutionnaires » lesquelles n'admettent pas la « blandenguería[9] ».
Le mot du développement dans la société cubaine à su s’imposer dans le temps comme une lampe d’huile clignotante. À la recherche de nouveaux essors, pour justifier les échecs ou pour faire valoir la raison même quand il est presque impossible de convaincre. Le mot devient un refuge, une douleur, une médecine qui peut faire encore plus de dommage.
Le mot « transition » est étranger aux Cubains de l'île. En dehors de Cuba, les exilés, les émigrants économiques, les chercheurs et des académiciens l’utilisent comme un mot clef dans tous les scénarios préconçus.
Pourrait-il se réinventer, le mot exact qui pousse au développement d'un « dialogue » entre tous les Cubains et qui génère la possibilité d'un « changement » ? En attendant, les mots du développement ont la parole.
[1] Permis de visite à l’étranger.
[2] Permis de résidence à l’étranger.
[3] Ceux qui émigrent dans des conditions plus confortables : voyages de visite, d’études, de travail ou de missions diverses en tant que coopérants, athlètes en compétition ou fonctionnaires.
[4] Du mot « jinete ». Cavalier, cavalière, qui se promène à cheval. Le mot est utilisé en allusion aux jeunes qui se prostituent mais de façon péjorative.
[5] Brigades de construction destinées à travailler dans des chantiers relevant d’une haute importance économique pour le pays.
[6] Les « remesas » sont les envois de fonds qui correspondent à la part des revenus gagnés à l’étranger que les migrants rapatrient chez eux.
[7] Personne qui travail à son compte, avec une « licencia » ou « patente » demandé aux autorités au préalable.
[8] Période entre 1971 et 1976 pendant lequel, le président du Conseil national de la culture (CNC) fut le principal exécuteur d’une politique de censure et de marginalisation à l’égard de centaines des intellectuels et artistes cubains.
[9] Du mot « blandengue », une personne faible, docile ; ici « blandenguería » va dans le sens récriminatoire aux personnes incapables d’affronter les difficultés, les problèmes.
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