L'évolution des mots dans la société cubaine à partir des années 80
Dès 1959, la propriété de logement a été l’objet de grandes transformations. La « réforme urbaine » de 1960 a donné lieu dans la décennie 80, à l'institut du logement. Il a fait disparaître complètement la « propriété privée » et les nouvelles politiques urbaines l’ont légiféré comme « propriété personnelle[1] ». Afin de trouver une solution aux difficultés de logement, la population a donné cours à l’imagination en innovant des nouveaux systèmes d'échange de logements à travers de la « permuta[2] ». La construction de logements suivait son rythme sans réussir à résoudre le manque de maisons. Travailler dans une « micro[3] », obtenir un « medio básico[4] » ou vivre dans une « biplante[5] » construite par l'entreprise, ont également marqué la décennie, qui s'est caractérisée par la « rectification des erreurs commises » et la prolifération de « chantiers sociaux » dont la qualité constructive n'intéressait pas. Le « plan » était un « mot d'ordre » et il fallait les terminer pour « accomplir le but », « accomplir le plan ».
La « perestroïka » et la « glasnost » soviétiques se sont intégrés au langage des jeunes, sans qu’ils n'obtinssent de changements ni la « transparence » si attendue. L’Etat a fait disparaître les revues soviétiques et celles en provenance des pays de l'Europe de l'Est. L'information s'est concentrée dans les publications nationales et les événements arrivaient au compte-gouttes.
Les changements opérés dans le bloc soviétique ont eu un impact catastrophique sur l'économie et la société cubaine avant l'écroulement du système en 1991. Devant le désespoir et le manque de la confiance dans l’avenir, le mot et les phrases sont devenus un aimant pour attirer les plus jeunes. Le mot « Súmate » et « Cubain 100 % » ainsi que d'autres modalités et jeux de mots ont été employés par la jeunesse communiste pour faire éveiller la couche sensible de la société, avide de concerts, des fêtes et des rencontres.
Le mot « internationalisme » s’est intégré au vocabulaire de presque toutes les familles cubaines. Une « solidarité » sans limites de Cuba envers les peuples du monde et dont le sens changeait à l'intérieur de l'île. « L'internationalisme » a atteint sa plus grande hauteur dans des terres d’Angola et après avoir terminé la guerre, le terme a touché de nouveaux horizons. Les « maîtres internationalistes » et les « constructeurs internationalistes » ont travaillé au Nicaragua, à l'Iraq, en Libye et dans l'île de Grenade. Les « missions » de médecins cubains se sont installées dans beaucoup d'autres pays. A son tour, l’internationalisme s’est étendu aux « conseillers sportifs ». Avec l'évolution des stratégies et une nouvelle vision de la solidarité, de nouveaux mots se sont installés dans la course, non pas vers le développement, mais à la recherche de solutions à la crise économique. La solidarité a récupéré son sens humaniste avec « l'opération miracle[6] ». Une dévotion solidaire laquelle a provoquée une diminution considérable de l'attention médicale à la population cubaine. Les professionnels cubains, de médecins fondamentalement, ils ont trouvé une sortie voir une évasion en acceptant des missions à l’étranger, une façon de combler leurs aspirations de réussite. En devenant « coopérants », les professionnels ont trouvé également un sens performant aux mots « résoudre », « lutter » et « survivre ». Néanmoins, la « coopération » cubaine est la « vente de services » à d'autres pays, dont le plus grand flux est vers la Venezuela, mais l’organisme qui gère la coopération a des missions dans d'autres pays du continent latino-américain, au Yémen, et dans quelques pays de l'Afrique.
La décennie 80 prend fin avec une phrase laquelle a fait basculer la société cubaine et qui a crevassé les bases du modèle cubain : « la période spéciale dans des temps de paix ». La phrase a été véhiculée pour justifier l'inefficacité du système, et pour laisser la responsabilité de la crise à ceux qui avaient décidé de rompre avec son modèle social et économique pour monter au train de « l'économie de marché ». Derrière la phrase « période spéciale » toutes les carences et misères sociales se cachaient.
[1] Dans les conditions propres au système socialiste cubain, la propriété personnelle du logement est le droit de jouissance d’un logement par le propriétaire et sa famille, une fois son prix payé et l’interdiction de l’utiliser comme une source de revenus. Carlos A. Casanova. La propriété du logement urbain à Cuba. Conflits et acteurs de 1959 jusqu’en 2005. Thèse de doctorat. Université Paris III-Sorbonne Nouvelle. Paris 2007.
[2] La « permuta » est l’échange des maisons entre particuliers, devenu système d’accès à la propriété et d’amélioration de l’habitat.
[3] « Micro » vient du mot « micro brigade », un mouvement constructif surgit dans les années 70 afin de développer la construction de logements ainsi que d’œuvres d’intérêt social.
[4] Logement de fonction appartenant à une entreprise ou organisme de l’Etat.
[5] Maison à deux étages construite avec des pièces préfabriquées.
[6] L’opération miracle est un programme de coopération humanitaire destiné à traiter les personnes souffrant des maladies de la vue. Le programme s’adresse aux secteurs les plus pauvres de la population latino-américaine.
Dès 1959, la propriété de logement a été l’objet de grandes transformations. La « réforme urbaine » de 1960 a donné lieu dans la décennie 80, à l'institut du logement. Il a fait disparaître complètement la « propriété privée » et les nouvelles politiques urbaines l’ont légiféré comme « propriété personnelle[1] ». Afin de trouver une solution aux difficultés de logement, la population a donné cours à l’imagination en innovant des nouveaux systèmes d'échange de logements à travers de la « permuta[2] ». La construction de logements suivait son rythme sans réussir à résoudre le manque de maisons. Travailler dans une « micro[3] », obtenir un « medio básico[4] » ou vivre dans une « biplante[5] » construite par l'entreprise, ont également marqué la décennie, qui s'est caractérisée par la « rectification des erreurs commises » et la prolifération de « chantiers sociaux » dont la qualité constructive n'intéressait pas. Le « plan » était un « mot d'ordre » et il fallait les terminer pour « accomplir le but », « accomplir le plan ».
La « perestroïka » et la « glasnost » soviétiques se sont intégrés au langage des jeunes, sans qu’ils n'obtinssent de changements ni la « transparence » si attendue. L’Etat a fait disparaître les revues soviétiques et celles en provenance des pays de l'Europe de l'Est. L'information s'est concentrée dans les publications nationales et les événements arrivaient au compte-gouttes.
Les changements opérés dans le bloc soviétique ont eu un impact catastrophique sur l'économie et la société cubaine avant l'écroulement du système en 1991. Devant le désespoir et le manque de la confiance dans l’avenir, le mot et les phrases sont devenus un aimant pour attirer les plus jeunes. Le mot « Súmate » et « Cubain 100 % » ainsi que d'autres modalités et jeux de mots ont été employés par la jeunesse communiste pour faire éveiller la couche sensible de la société, avide de concerts, des fêtes et des rencontres.
Le mot « internationalisme » s’est intégré au vocabulaire de presque toutes les familles cubaines. Une « solidarité » sans limites de Cuba envers les peuples du monde et dont le sens changeait à l'intérieur de l'île. « L'internationalisme » a atteint sa plus grande hauteur dans des terres d’Angola et après avoir terminé la guerre, le terme a touché de nouveaux horizons. Les « maîtres internationalistes » et les « constructeurs internationalistes » ont travaillé au Nicaragua, à l'Iraq, en Libye et dans l'île de Grenade. Les « missions » de médecins cubains se sont installées dans beaucoup d'autres pays. A son tour, l’internationalisme s’est étendu aux « conseillers sportifs ». Avec l'évolution des stratégies et une nouvelle vision de la solidarité, de nouveaux mots se sont installés dans la course, non pas vers le développement, mais à la recherche de solutions à la crise économique. La solidarité a récupéré son sens humaniste avec « l'opération miracle[6] ». Une dévotion solidaire laquelle a provoquée une diminution considérable de l'attention médicale à la population cubaine. Les professionnels cubains, de médecins fondamentalement, ils ont trouvé une sortie voir une évasion en acceptant des missions à l’étranger, une façon de combler leurs aspirations de réussite. En devenant « coopérants », les professionnels ont trouvé également un sens performant aux mots « résoudre », « lutter » et « survivre ». Néanmoins, la « coopération » cubaine est la « vente de services » à d'autres pays, dont le plus grand flux est vers la Venezuela, mais l’organisme qui gère la coopération a des missions dans d'autres pays du continent latino-américain, au Yémen, et dans quelques pays de l'Afrique.
La décennie 80 prend fin avec une phrase laquelle a fait basculer la société cubaine et qui a crevassé les bases du modèle cubain : « la période spéciale dans des temps de paix ». La phrase a été véhiculée pour justifier l'inefficacité du système, et pour laisser la responsabilité de la crise à ceux qui avaient décidé de rompre avec son modèle social et économique pour monter au train de « l'économie de marché ». Derrière la phrase « période spéciale » toutes les carences et misères sociales se cachaient.
[1] Dans les conditions propres au système socialiste cubain, la propriété personnelle du logement est le droit de jouissance d’un logement par le propriétaire et sa famille, une fois son prix payé et l’interdiction de l’utiliser comme une source de revenus. Carlos A. Casanova. La propriété du logement urbain à Cuba. Conflits et acteurs de 1959 jusqu’en 2005. Thèse de doctorat. Université Paris III-Sorbonne Nouvelle. Paris 2007.
[2] La « permuta » est l’échange des maisons entre particuliers, devenu système d’accès à la propriété et d’amélioration de l’habitat.
[3] « Micro » vient du mot « micro brigade », un mouvement constructif surgit dans les années 70 afin de développer la construction de logements ainsi que d’œuvres d’intérêt social.
[4] Logement de fonction appartenant à une entreprise ou organisme de l’Etat.
[5] Maison à deux étages construite avec des pièces préfabriquées.
[6] L’opération miracle est un programme de coopération humanitaire destiné à traiter les personnes souffrant des maladies de la vue. Le programme s’adresse aux secteurs les plus pauvres de la population latino-américaine.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire